
LeMonde Job: WPA1610--0007-0 WAS SPA1610-7 Op.: XX Rev.: 15-10-99 T.: 09:00 S.: 111,06-Cmp.:15,09, Base : LMQPAG 01Fap: 100 N
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LA COUPE DU MONDE DE RUGBY 1999 LE MONDE / SAMEDI 16 OCTOBRE 1999 / VII
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A 15 heures et 3 minutes, alors que le match
était à peine commencé, Jonah Lomu
a ramassé la balle et il a démarré.
Et là, la chose que les Anglais n’avaient
même pas imaginée dans leurs pires cauchemars,
cette chose-là s’est produite
Le 18 juin 1995, au Cap, Jonah Lomu
invente le rugby du XXI
e
siècle
Il y a un peu plus
de quatre ans,
dans un pub londonien,
l’ancien joueur du
Racing Club de France,
Philippe Guillard,
regardait avec un ami
la demi-finale
Angleterre-
Nouvelle-Zélande
de la Coupe du monde
disputée en Afrique
du Sud. Il se souvient
des trois minutes
qui ont ébranlé
le monde du rugby
A
15 heures et
3 minutes, Jonah
Lomu a ramassé
la balle avec une
main, à quarante
mètres de la
ligne d’en-but
anglaise, et il est
parti. Nous
sommes au tout début de la demi-
finale de la Coupe du monde 1995,
le 18 juin, au Newlands Stadium
du Cap. Les deux équipes sortent
à peine des hymnes, elles n’ont eu
le temps de s’observer que pen-
dant le haka.
Je me trouvais à Londres, dans
un pub, avec mon ami Lulu, qui
joue avec moi, dans un tout petit
club de la région parisienne. La
veille, il m’avait dit : « Il faut abso-
lument qu’on aille à Londres pour
voir ce match ! » Lulu courait
après un rêve : être là, au milieu
des Anglais le jour où ils pren-
draient une vraie pâtée. Lulu
n’aime pas trop les Anglais. «Je
sens, avait-il dit, qu’il va se passer
quelque chose ... »
Comme il se trompe rarement,
je l’avais suivi dans ce pub outre-
Manche. Pourtant, ce samedi-là,
on était triste. La veille, à Durban,
l’équipe de France avait fait
10 000 kilomètres pour mourir à
10 centimètres de la finale de la
Coupe du monde. Contre
l’Afrique du Sud. Heureusement,
les Anglais étaient gentils avec
nous. Ils nous consolaient, nous
disaient qu’on n’avait pas eu de
chance, qu’on était bien meilleurs
que l’Afrique du Sud, qu’on méri-
tait la finale... Bref, disait Lulu :
« Quelle belle bande d’hypo-
crites ! »
A 15 heures et 3 minutes donc,
Jonah Lomu a ramassé la balle
avec une main, et il a démarré. Il
faut bien avouer que, jusque-là,
dans le pub, c’était la fête. Gros
plan sur un Anglais ? Standing
ovation ! Gros plan sur un Néo-
Zélandais ? Sifflets. Quand on
pense que le mot fair-play est an-
glais...
L’Angleterre craignait, certes,
les All Blacks, Jonah Lomu en tête,
mais on ne voyait pas bien ce qui
pouvait arriver de grave à une
équipe qui venait tout simple-
ment d’éliminer les champions du
monde en titre, l’Australie, en
quarts de finale, et qui, en plus,
avait brillamment remporté le
Grand Chelem dans le Tournoi
des cinq nations. Les Anglais,
c’était un pack de fer, une défense
du même métal, et un buteur car-
nassier. Du solide. Même la répu-
tation de Lomu n’inquiétait pas
l’entraîneur anglais, Jack Rowell.
Pourtant, nous, on le trouvait
pas mal ce Lomu, avec son mètre
quatre-vingt-dix-huit et ses 115 ki-
los. Depuis le début de la Coupe
du monde, il avait quand même
explosé trois Irlandais et envoyé
deux Japonais dans les tribunes
rien qu’avec une épaule. Mais
non, lui, Jack Rowell, ne s’inquié-
tait pas trop, car, avait-il dit, «Lo-
mu ne sait pas défendre »... Il avait
même poussé la sérénité jusqu’à
laisser Tony Underwood, l’un des
tout premiers ailiers de l’hémi-
sphère Nord, en face de lui. Ce qui
faisait tout de même une diffé-
rence de 20 centimètres et de
30 kilos. Et comme le rugby est le
seul sport de combat qui ne fonc-
tionne pas par catégorie, on se di-
sait que le gars Underwood, il al-
lait souffrir. Mais non, parce que
Jack Rowell avait tout pensé
avant.
E
N face, les All Blacks, c’était
surtout une attaque virevol-
tante, et l’esprit de sacrifice
d’un pack plus enclin à suivre les
envolées lyriques des trois-quarts
qu’à perdre de l’énergie dans ces
travaux de grammaire ovale que
voulaient imposer les Anglais.
Bref, en privant les Néo-Zélandais
de munitions grâce à la supériori-
té de leur pack – reconnue par
tous, et même par les All Blacks –,
toute l’Angleterre était sûre d’im-
poser son rugby centenaire fait
d’une prise minimale de risques et
d’une force dosée uniquement
pour gagner du terrain. Il était en-
tendu que Rob Andrew, l’élégant
buteur aux longues études, ferait
le reste du travail.
Seulement voilà : à 15 heures et
3 minutes, alors que le match était
à peine commencé, Jonah Lomu a
ramassé la balle, et il a démarré.
Et, là, la chose que les Anglais
n’avaient même pas imaginée
dans leurs pires cauchemars, ce
que Tony Underwood, le bel ailier
pilote de chasse de la Royal Air
Force, redoutait sans y croire, et
surtout ce que Lulu espérait de-
puis son enfance, cette chose-là
s’est produite.
Jonah Lomu a donc ramassé la
balle, et il a démarré. Et Tony Un-
derwood, qui avait dû se répéter
la scène des dizaines de fois dans
la nuit, n’a même pas eu le temps
d’avoir peur. Au moment où il a
piqué dans les jambes du
monstre, décidé, motivé, patriote,
Lomu lui a mis un raffut d’un
simple index, et l’avion du pilote
de chasse Underwood s’est écrasé
sur le pif. Dans le pub, les filles se
sont tues, et les garçons se sont
levés. En silence.
Le capitaine des Anglais, Will
Carling, plus costaud que Tony
Underwood, plus habitué aux
forts contacts, est arrivé en tra-
vers avec une véritable envie de
défendre la patrie. Will Carling est
quand même le capitaine de
l’équipe d’Angleterre, voire de la
Grande-Bretagne, et donc de la
moitié du monde. Du coup, toute
l’Angleterre revit. Elle a
confiance, elle le sait exemplaire.
A 15 heures 3 minutes et 2 se-
condes, le capitaine de l’Angle-
terre et de la moitié du monde,
Will Carling, se jette donc dans les
jambes de Jonah Lomu, fier et dé-
cidé. A 15 heures, 3 minutes et
3 secondes, le capitaine de l’An-
gleterre se crashe lui aussi au sol
et prend, en prime, la chaussure
droite de Jonah Lomu sur le nez.
Cette fois, même les filles du pub
se sont levées.
Il reste dix mètres à faire pour
marquer l’essai. Jonah Lomu
court toujours et, derrière lui, il a
laissé deux corps gisant dans un
bain de honte et d’impuissance.
Il ne reste plus qu’une chance
d’empêcher Jonah-King Kong
d’aller aplatir derrière la ligne.
Cette chance, c’est Mike Catt, l’ar-
rière anglais. Mais ça ne l’arrange
pas du tout, Mike Catt, d’être le
dernier espoir d’un peuple. Mike
Catt, ce jour-là, à cet instant-là, il
aurait rêvé d’être à la pêche à la
truite, très loin de tout ça, dans le
nord de l’Ecosse. Ou encore, pré-
féré être l’une de ces statues de la
garde royale, devant Buckingham
Palace. Comme ça, Lomu serait
passé à côté. Il aurait même peut-
être pris une photo. Seulement
voilà, ce jour-là, Mike Catt n’est
pas devant la grille du palais, mais
sur le terrain du Newlands Sta-
dium, pour une demi-finale de la
Coupe du monde de rugby. Et Jo-
nah Lomu n’est pas là pour le tou-
risme. Apparemment, il veut mar-
quer son essai. Et la ligne est à
quatre mètres.
Mike Catt, arrière émérite du
XV de la Rose de Sa Majesté la
reine d’Angleterre, va essayer de
plaquer Jonah Lomu de face. Et, à
15 heures 3 minutes et 6 secondes,
Mike Catt rebondit sur 115 kilos
de viande folle avant d’être écrasé
comme une fourmi, puis piétiné.
Jonah Lomu plonge alors en Terre
promise, le sourire au coin des
lèvres. A peine essoufflé. Derrière
lui, il y a trois corps, maintenant.
Et, dans le pub, une centaine de
cœurs transpercés : Jonah vient
de tuer l’Angleterre.
L
E reste du match n’est
qu’une suite photocopiée
de cette action, une bou-
cherie. 15-0 au bout de six mi-
nutes de jeu. Puis 25-3 à la mi-
temps, puis 35-3, en pleine demi-
finale de la Coupe du monde,
contre la meilleure équipe de l’hé-
misphère Nord. Avec trois essais
de Lomu. Du jamais vu. Du pas
croyable.
Lulu était aux anges. Il avait
réalisé son rêve. Bien sûr, il
n’avait pas oublié de consoler
tout le monde dans le pub, de leur
dire qu’ils avaient eu un « jour
sans ». Qu’ils auraient mérité de
la gagner aussi, cette Coupe du
monde. Mais il savait aussi,
comme moi, qu’on venait d’assis-
ter à quelque chose d’historique.
Au-delà du match, au-delà du
score (45 à 29), ce qu’avait fait Jo-
nah Lomu représentait bien plus
qu’une chevauchée fantastique.
Bien plus encore qu’une preuve
officielle de la future domination
du rugby de l’hémisphère Sud sur
celui du Nord. Jonah Lomu avait
tout simplement fait ce que Webb
Ellis avait fait un siècle et demi
auparavant, il avait ramassé la
balle avec une main, et inventé le
rugby du siècle à venir.
Philippe Guillard
Jonah Lomu
a ramassé le ballon
à quarante mètres
de la ligne adverse.
D’un raffut
de la main droite,
il expédie
le trois-quarts aile
anglais Tony
Underwood le nez
dans le gazon
du Newlands
Stadium
(ci-contre), échappe
au plaquage
du capitaine,
Will Carling,
revenu en travers
(à gauche), puis
culbute l’arrière,
Mike Catt, qui a
tenté de se mettre
en travers
de sa route
(ci-dessous) : les
Blacks se qualifient
pour la finale
de la Coupe
du monde 1995,
et la planète rugby
découvre sa
nouvelle star.
TEMPSPORT-COLORSPORT
VINCENT AMALVY/AFP
VINCENT AMALVY/AFP
POULE A
CLASSEMENT
Pts J G N P Pp Pc
1 Afr. du Sud 622009332
2 Ecosse 421017258
3 Uruguay 421013958
4 Espagne 220021874
Espagne-Uruguay 15-28
Ecosse-Afr. du Sud 29-46
Ecosse-Uruguay 43-12
Afr. du Sud-Espagne 47-3
Afr. du Sud-Uruguay
Ecosse-Espagne
RÉSULTATS
ET CLASSEMENTS
2/10
3/10
8/10
10/10
15/10
16/10
POULE B
CLASSEMENT
Pts J G N P Pp Pc
1
N
elle
-Zélande
93300 176 28
2
Angleterre
4210183 37
3 Tonga 4210137 70
4 Italie 3300335 196
Angleterre-Italie 67-7
N
elle
-Zélande-Tonga 45-9
N
elle
-Zélande-Angleterre 30-16
Tonga-Italie 28-25
N
elle
-Zélande-Italie 101-3
Angleterre-Tonga
2/10
3/10
9/10
10/10
14/10
15/10
POULE C
CLASSEMENT
Pts J G N P Pp Pc
1 Fidji 62200
105
40
2 France 622008033
3 Canada 53002
114
82
4 Namibie 3300342
186
Fidji-Namibie 67-18
France-Canada 33-20
France-Namibie 47-13
Fidji-Canada 38-22
Canada-Namibie 72-11
France-Fidji
1/10
2/10
8/10
9/10
14/10
16/10
POULE D
CLASSEMENT
Pts J G N P Pp Pc
1
P. de Galles
7 3 2 0 1 71
2 Samoa 732019772
3 Argentine 421015039
4 Japon 2200224
107
Galles-Argentine 23-18
Samoa-Japon 43-9
Galles-Japon 64-15
Argentine-Samoa 32-16
Galles-Samoa 31-38
Argentine-Japon
1/10
3/10
9/10
10/10
14/10
16/10
POULE E
CLASSEMENT
Pts J G N P Pp Pc
1 Australie 93300 13531
2 Irlande 421015631
3 Roumanie 421013682
4 Etats-Unis 3300352 135
Irlande-Etats-Unis 53-8
Australie-Roumanie 57-9
Etats-Unis-Roumanie 25-27
Irlande-Australie 3-23
Australie-Etats-Unis 55-19
Irlande-Roumanie
2/10
3/10
9/10
10/10
14/10
15/10
MARQUEURS
Leaega (Samoa) 52 points
Rees (Canada) 49 points
Jenkins (Galles) 48 points
Quesada (Argentine) 45 points
1
3
4
Burke (Australie) 45 points
4
5
2
2
2
Lomu (N
elle
-Zélande) 5 essais
Wood (Irlande) 4 essais
1
Wilson (N
elle
-Zélande) 4 essais
RÉALISATEURS
Rees (Canada) 49 points
Jenkins (pays de Galles) 48 points
Quesada (Argentine) 45 points
1
3
Leaega (Samoa) 42 points
Wilkinson (Angleterre) 39 points
BUTEURS
Pp = Points pour Pc = Points contre
118
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