
Vol. 1, N° 2, Summer 1994 EC COMPETITION POLICY NEWSLETTER PAGE 29
Le Tribunal précise que le caractère définitif de la décision
n'est pas remis en cause par l'expression "at this stage", qui,
selon lui, se réfère à l'engagement, inclus dans la lettre
précédente de M. Temple Lang, de réexaminer la plainte si
des éléments nouveaux apparaissaient. Le Tribunal considère
qu'une telle réserve quant à la découverte d'éléments
nouveaux s'incorpore dans toute décision d'une autorité
administrative.
2.2. Le rejet de cette exception d'irrecevabilité entraîne celui
du deuxième argument de la Commission, selon lequel la
lettre litigieuse n'affecte pas la situation juridique des
requérants, au motif notamment que ceux-ci restent libres de
former un recours contre tout rejet définitif de leur plainte ou
d'introduire un recours en carence.
Pour la même raison, le Tribunal repousse l'argument tiré de
l'incompétence
de l'auteur de l'acte. Après avoir rappelé la
jurisprudence suivant laquelle il y a lieu de s'attacher à la
substance - et non à la forme - des actes ou décisions pour
déterminer s'ils constituent des actes au sens de l'article 173,
il écarte la similitude avec les lettres administratives, qui ne
sont pas attaquables (arrêts "parfums" du 10 juillet 1980),
notamment du fait de l'absence pour les demandes prévues
à l'article 3 du règlement n° 17 des obligations de forme
imposées à la Commission en cas de demande d'attestation
négative ou d'exemption. Dès lors que l'acte attaqué
comporte une appréciation claire et définitive de la demande,
la nature de cet acte ne saurait être remise en cause par la
circonstance que cette appréciation n'émanerait que des
services de la Commission, sauf à priver l'article 3 de tout
effet utile.
3. Sur le fond
, le Tribunal estime que la décision attaquée,
consistant à rejeter la plainte pour défaut d'intérêt
communautaire, repose sur trois motifs:
- l'entente alléguée doit cesser de produire ses effets le 1er
janvier 1993, si bien que l'enquête se rapporterait, pour
l'essentiel, à des faits passés;
- cet accord était connu et autorisé par les autorités
britanniques;
- il ne concernerait pas, principalement, le commerce entre
Etats membres.
3. Le Tribunal accueille successivement les moyens des
requérants contestant la légalité de ces motifs de rejet de la
plainte.
3.1. Pour justifier que l'ouverture d'une instruction ne se
justifiait pas, l'entente dénoncée devant cesser ses effets
quelques mois plus tard, la décision du 17 mars 1992 se
fondait sur l'entrée en vigueur d'un compromis
commercial
entre la Communauté et le Japon dans le secteur automobile,
aux termes duquel les limitations
nationales seraient abolies
au plus tard le 1er janvier 1993. Pour les requérants, la
décision attaguée n'exposerait pas comment le compromis est
susceptible de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles
alléguées.
Le Tribunal répond sur la base de son arrêt du 18 septembre
1992 dans l'affaire dite "Automec II" (T-24/90, Rec. p. II-
2223). Il rappelle que la Commission n'est pas tenue de
mener une instruction lorsqu'elle est saisie d'une demande au
titre de l'article 3 du règlement n° 17, mais qu'elle est
obligée d'examiner attentivement les éléments de fait et de
droit portés à sa connaissance par le plaignant.
Il rappelle encore qu'il est légitime, pour déterminer le degré
de priorité à accorder aux affaires dont elle est saisie, que la
Commission se réfère à l'intérêt communautaire que
présentent ces affaires. Il précise que cela n'aboutit pas à
soustraire l'action de la Commission au contrôle
juridictionnel, puisque, en vertu de l'exigence de motivation,
énoncée à l'article 190 du traité, la Commission ne saurait se
borner à se référer abstraitement à cette notion.
Pour vérifier si la conclusion du compromis commercial
susmentionné est de nature à mettre fin à l'accord en cause
avant le 1er janvier 1993, le Tribunal analyse les documents
relatif à ce compromis produits par la Commission,
(communication conjointe de la Communauté et du Japon au
GATT; déclarations du membre de la Commission et du
ministre japonais compétents, extrait d'un compte-rendu de
débats à la "House of Commons"; déclaration de presse de
SMMT et de JAMA; communiqué du bureau de la
Commission à Tokyo), ainsi que la déclaration du
représentant de la Commission à la procédure orale suivant
lequel le compromis n'a pas fait l'objet d'un document écrit
et qu'il ne s'agit pas d'un accord au sens de l'article 113 du
traité. Dans ces conditions, il estime qu'un engagement non
écrit, de portée purement politique et ne s'inscrivant pas dans
le cadre de la politique commerciale commune, assorti de
plus d'une période d'application transitoire expirant fin 1999,
n'autorise pas à répondre que ledit engagement mettrait fin,
nécessairement, à l'accord dénoncé par les requérants.
3.2. Le deuxième motif de la Commission pour justifier le
rejet de la plainte est tiré du fait que l'accord
en cause a été
autorisé
par les autorités du Royaume-Uni, pour des raisons
de politique commerciale.
Le Tribunal estime que ce motif est entaché d'une erreur de
droit. D'une part, l'accord SMMT-JAMA ne constitue pas
une mesure nationale de politque commerciale, mais bien un
concours de volontés entre des groupements professionnels
d'opérateurs économiques intervenants sur le marché,
susceptible de relever du champ d'application de l'article 85,
§ 1 et, le cas échéant, de l'article 86. D'autre part, ainsi qu'il
ressort d'une jurisprudence bien établie, la circonstance que
le comportement d'entreprises ait été connu, autorisé ou
même encouragé par des autorités nationales est sans
influence au regard de l'applicabilité de l'article 85 du traité
ou, le cas échéant, de son article 86 (arrêts de la Cour du 10
janvier 1985, Leclerc, 229/83, Rec. p. 1 et du Tribunal du 29
juin 1993, Asia Motor, T-7/92, Rec. p. II-669, point 71).
3.3. Dans la décision litigieuse, la Commission invoque enfin
la circonstance que les arrangements en cause ne
concerneraient pas principalement les échanges
commerciaux
entre Etats
membres.
Or, le Tribunal estime que ces arrangements sont, de par leur
nature même, susceptibles de porter atteinte au
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